Ils sortent de la maison, ses parents s’approchent de la voiture. Pendant qu’ils ont le dos tourné, elle recule vivement et tourne au coin de la rue. Elle voit un homme sur le trottoir d’en face, elle lui sourit et joint les mains, comme pour prier. « Lili ! » appelle sa mère. Elle les rejoint et au lieu de monter dans la voiture, ils remontent la rue à pied. Ils longent le square, le temps est maussade, les environs sont déserts, il est seize heure tout juste passé. Lili à l’air ailleurs, sa mère s’inquiète mais ne dit rien. Son père, en retrait, les suit à son allure. Il les observe, un mince sourire aux lèvres.
La famille arrive sur la place de la basilique, un rayon de soleil transperce les nuages, éclaire la jeune fille d’une lumière dorée. Et lève les yeux, sourit en retour et chuchote quelques mots inintelligibles. Son père regarde de l’autre côté, seule sa mère remarque l’expression d’extase fugitive sur le visage de sa fille.
« Ça va aujourd’hui Lili ?
– Très bien maman ! Il va faire beau finalement on dirait ! Super !
– D’accord ma fille »
Et sur ses mots elle la serre un instant contre elle mais Lili résiste imperceptiblement à son étreinte. Elle me fuie pense sa mère, comme si elle s’était confiée à quelqu’un d’autre.
Tandis que la famille s’installe dans l’herbe à l’ombre d’un grand conifère, seule Lili repère de l’autre côté de la route l’homme de tout à l’heure qui manifestement les à suivi. Elle lui adresse un discret hochement de tête, joint les mains comme la première fois et dit cette fois à haute voix : « J’arrive, promis lumière ».
Les deux parents discutent vivement, ça frise l’engueulade et le temps est de nouveau gris, les nuages sont très bas. Lili à l’impression que les bâtiments autour d’elle s’estompent petit à petit, non pas masqué par le brouillard mais disparus bel et bien. Elle s’éloigne pieds nus dans l’herbe fraîche. Elle marche sans but précis et quand elle se retourne ses parents ont disparus. Pour autant, aucune peur ne l’habite, elle sent un point chaud, quelque part, pas loin, très près en fait, elle cherche.
La brume se lève subitement, pourtant le monde reste uniformément blanc, comme une page vierge qui attend le pinceau de l’artiste. Elle rit et tourne sur elle-même. Enfin elle aperçoit une silhouette au loin ou bien tout près, c’est difficile de savoir dans cet étrange monde de blancheur immaculée. Son rire de nouveau envahit cet espace impossible. Bien sûr se dit-elle. C’est lui. Elle sautille vers l’homme de la rue, c’est lui évidemment se répète-t-elle. Il paraît différent. Il est habillé de blanc, comme l’univers autour de lui mais pourtant, Lili discerne parfaitement son costume de l’arrière-plan. Il lui fait un grand sourire, un brin carnassier mais la jeune fille ne s’en rend pas compte.
Celle-ci est juste devant l’homme, il est plus grand qu’elle, ses vêtements sont impeccablement ajustés sur son corps musclé. Il lui tend la main et dans celle-ci, un orbe de lumière dorée lance des éclairs de chaleur apaisante. Elle n’hésite pas une seconde et s’en saisit. Le monde blanc explose de couleurs lumineuses, chatoyantes, divines. C’est là que Lili disparaît. Enlevée par les anges.
Près de la basilique, sous un ciel de nuages bas et gris, ses parents la cherche d’abord inquiets puis bientôt paniqués. Bientôt une alerte enlèvement serait lancée. En vain. Si l’enfer est pavé de bonnes intentions, le chemin du paradis est une voie sans retour. Adieu Lili.